jeudi 26 mai 2016
Alors que le FN montre à nouveau son visage anti-ouvrier en demandant l’interdiction des manifestations, l’intersyndicale de l’Education nationale a pris à la mi-mai une initiative intéressante : Nous publions ici le communiqué unitaire et l’article paru dans le quotidien « Le Progrès Social » :
Stage intersyndical Extrême(s) droite(s) contre l’éducation : Une première ! Une réussite !
Pour une première initiative de cette nature, le moins que l’on puisse dire est que ce stage intersyndical a été une véritable réussite. Avec plus de 200 stagiaires réuni-e-s, nos organisations syndicales - aux côtés de VISA, Questions de classe(s), d’éditeurs militants - ne peuvent que se féliciter de l’intérêt suscité par ces deux journées de débat et de mobilisation en Île-de-France.
Enseignant-e-s du premier et du second degré, personnels de l’Éducation Nationale, représentant-e-s de parents d’élèves, mais aussi fonctionnaires territoriaux... étaient venu-e-s se former sur des sujets à la fois pédagogiques et politiques, donc, on ne peut plus syndicaux ! Les échanges ont été parfois vifs, souvent convergents, toujours constructifs. Ils ont démontré que si la lutte contre les idées des « extrêmes droites » n’a rien d’évident, elle passe en tout cas par la connaissance de l’histoire de l’ensemble des mouvements qui la composent. Elle passe aussi par l’analyse des stratégies des différentes mouvances, des fascistes aux complotistes, des islamo-radicaux aux catho-intégristes, des ultra-libéraux aux soraliens ...
C’est ce que les intervenant-e-s invité-e-s, historien-ne-s, enseignant-e-s, journalistes ont pu détailler avant que les stagiaires ne les interrogent sur des cas concrets, ne les interpellent sur leur propre vécu et sur les perspectives pour les années à venir.
À n’en pas douter, ces deux journées marquent une première dans le paysage politico-syndical. Le collectif Racine (enseignants du Rassemblement Bleu Marine), dont il a été longuement question durant ces 48 heures, ne s’est d’ailleurs pas trompé en dénonçant le jour même cette initiative.
Cette réussite est un bon signe et une invitation à poursuivre et amplifier ce que nous avons engagé ces 9 et 10 mai, notamment dans les départements. Ce sera la prochaine étape !
Communiqué CGT éducation - CNT éducation - CNT-SO éducation - FSU - SUD éducation & Visa et Questions de classe(s)
L’article dans le Progrès Social du 14 mai :
Les 9 et 10 mai, à la Bourse du travail de Saint-Denis, un stage régional intersyndical intitulé « Extrême(s) droites(s) contre éducation » s’est déroulé. Grégory Chambat - enseignant, syndicaliste et auteur de L’école des réac-publicains, la pédagogie noire du FN et des néo-conservateurs (Libertalia, 2016) - y était présent. Il a accepté d’en restituer les enjeux pour Le Progrès Social.
L’éducation – disons plutôt « rééducation » - est une obsession parfois méconnue de l’extrême droite française. C’est pour comprendre cette menace et engager la riposte que plus de 200 personnes – enseignants, éducateurs, animateurs et parents d’élèves - se sont retrouvées. Initiée par cinq syndicats de l’éducation (CGT, CNT, CNT-SO, FSU et SUD) et co-organisée par VISA (Vigilance et initiatives syndicales antifascistes) et le collectif Questions de classe(s), cette rencontre était placée sous le signe de l’unité. Des éditeurs militants (Syllepse et Libertalia) étaient présents.
État des lieux
Perspective historique, présentation de la nébuleuse réactionnaire qui fait de la question scolaire son cheval de bataille (au-delà du seul FN, on pense à l’activisme des réseaux intégristes ou l’ultra-médiatisation des idéologues de l’identité), ateliers sur le complotisme, etc. Les organisateurs souhaitaient articuler interventions d’auteurs (dont Jean-Paul Gautier, auteur de De Le Pen à Le Pen, continuités et ruptures, Syllepse, 2015) et témoignages de militants sur leur expérience de terrain. Le cas de Mantes-la-Ville, première commune d’Île-de-France passée aux mains d’un maire FN lui-même enseignant…, fût particulièrement débattu.
Le décryptage de la rhétorique des « réac-publicains » a mis en lumière l’obsession de la « révolution conservatrice » concernant l’éducation. Il met en évidence l’hégémonie culturelle de cette nébuleuse, qui impose ses mots (« égalitarisme », « médiocratie », « pédagogisme », etc.). Aujourd’hui, Elle aspire à monopoliser le discours critique sur l’institution au profit de son projet social autoritaire, de sa haine de l’égalité et de la démocratie.
Reconstruire des pratiques
Dans un milieu où, en quelques mois, le vote FN a quasiment triplé ; dans un contexte où l’école est un laboratoire des mairies frontistes, il ne s’agissait pas de sortir de ces journées en « observateurs » aguerris mais de (re)construire des pratiques égalitaires et démocratiques, de les diffuser et de les partager auprès des collègues.
En replaçant l’action contre les droites radicales dans le quotidien de nos lieux de travail et non dans le registre de la dénonciation morale, il importe d’agir contre une institution qui fonctionne déjà de manière trop autoritaire, inégalitaire et conservatrice.
Pour Marion Maréchal Le Pen, l’école « est au cœur de nos préoccupations pour 2017. ». Face à cette affirmation, il s’agit d’être à la hauteur. L’école peut et doit devenir un espace non seulement de résistance mais d’offensive pour le mouvement social. Cela passe par des dynamiques syndicales unitaires, des perspectives de mobilisations mais aussi la (ré)activation de pratiques pédagogiques visant, dans les faits, l’égalité et l’émancipation. Du matériel militant élaboré par les participants, un document intersyndical de sensibilisation, un numéro de la revue N’Autre école – Questions de classe(s) consacré à ce stage et d’autres initiatives décentralisées y contribueront.
Démontrant l’enjeu du milieu scolaire pour les extrémistes, le Collectif Racine, présidé par Alain Avello qui gravita autour des néofascistes belges du PCN, dénonce ce stage intersyndical comme « un détournement du droit à formation syndicale, mobilisation illégitime de l’argent public ne devant pourtant servir que le seul bien public ». Rien que ça.
En réponse au maire FN de Mantes-la-Ville déclarant « Le social, c’est pas moi », les participants à ces deux journées réaffirment, depuis la Bourse du Travail, « Le social, c’est nous ! ». Grégory Chambat (Q2C)