mardi 25 juin 2019
C’est en 1999 qu’une première fois Lionel Jospin déclare, face aux licenciements programmés par Michelin (dont les bénéfices étaient colossaux) :
« Les salariés existent, il y a des syndicats, il y a une mobilisation qui peut se mener. Donc, je crois qu’il ne faut pas attendre tout de l’Etat et du gouvernement. »
Puis il récidive en 2002 devant les salariés de Lu à Evry :
"Un ouvrier de Lu : Danone veut nous licencier pour gagner encore plus d’argent ailleurs. Pourquoi vous réquisitionnez pas, nationalisez, sauvez nos emplois...
Lionel Jospin : Si à chaque fois qu’il y a un plan social on doit nationaliser !"
Après la trahison des sidérurgistes et des mineurs par le gouvernement PS/PC en 1983/84, la rupture entre la gauche gouvernementale et le monde ouvrier était définitivement actée.
Mais c’est en 2013 qu’une coordination importante se met en place : Goodyear, Sanofi, PSA-Aulnay, Virgin, Prestaliss... et déjà les Ford, accompagnée de structures syndicales et politiques plurielles. L’expérience est riche et prometteuse. Plusieurs réunions à la Bourse de Paris et quelques manifestations auto-organisées suivront jusqu’à ce que Wamen et Rylov, l’avocat des Goodyear, ne brisent brutalement la dynamique, sans explication, en pleine réunion de coordination qui n’y survit pas...
C’est pourquoi ce nouvel appel des Ford est pertinent et qu’il pourrait, dans le contexte de plans sociaux qui accélèrent, être la base d’une nouvelle aventure militante en directe avec les salariés concernés. En 2013 les directions confédérales se sentant contournées avaient préféré se tenir en dehors. Encore une occasion de perdue alors qu’une unité à la base s’était forgée...
Espérons que la direction de la CGT sera plus réactive pour soutenir et accompagner une nouvelle coordination. Voici le texte de l’appel des Ford :
Pour un « tous ensemble » contre les licenciements et les fermetures d’entreprises partout
Cela fait des décennies que les plans de fermetures et de licenciements se succèdent quelque soit le secteur économique, dans l’industrie comme dans le commerce, la téléphonie, sans oublier tous les plans de suppressions d’emplois dans tous les services publics. Donc rien de nouveau mais aujourd’hui, les situations dramatiques se multiplient dans une situation sociale déjà très marquée par le chômage et la précarité.
Les exemples sont très nombreux. Il y a les cas emblématiques comme Ascoval St Saulve, Whirlpool à Amiens, General Electric à Belfort, Ford à Blanquefort. Et il y a aussi des dizaines d’autres exemples comme Arjowigins, ACC, Bultex, Bic, Auchan, Carrefour, Castorama...
Partout les licenciements sont le résultat des mêmes logiques destructrices de la course aux profits et à la productivité. Partout les profits et les dividendes sont là, énormes souvent. Partout enfin des subventions publiques importantes ont été perçues (CICE, exonérations cotisations sociales, aides diverses). Mais cela n’empêche rien, il est devenu extrêmement facile de licencier, de fermer une usine ou un magasin. Partout donc les mêmes politiques patronales, les mêmes stratégies pour nous faire accepter l’inadmissible, pour nous faire taire.
De leur côté, l’Etat, les pouvoirs publics, les collectivités territoriales ne font que constater les dégâts, s’indignent mais se disent sans moyen d’agir et confirment à chaque fois leur inefficacité ou leur incompétence, incapables de s’opposer ou même de limiter les dégâts sociaux.
Du coup, nous salarié.e.s, équipes syndicales, nous résistons comme nous pouvons, avec les moyens du bord et malheureusement nous perdons la plupart du temps. Difficulté supplémentaire, nous ne sommes même pas aidé.e.s par nos confédérations ou fédérations syndicales qui restent passives, sans initiatives. Il n’est pas compliqué de comprendre que notre force et notre chance de pouvoir empêcher les licenciements se trouveraient dans une riposte d’ensemble, dans la convergence de nos résistances, ce qui pourrait changer le rapport de forces.
Alors que faire ? Comme rien ne vient de nos structures syndicales, quelles qu’elles soient, nous n’avons pas d’autre choix que d’essayer par nous-mêmes. Chez nous à l’usine Ford de Blanquefort, nous sommes toujours en lutte contre la fermeture, en utilisant peut-être une dernière cartouche, celle de la justice. Pour beaucoup, la cause est perdue mais l’ampleur des conséquences dans la région bordelaise, les 2000 emplois concernés (directs et induits) nous pousse à ne rien lâcher. Et nous sommes convaincus que l’issue de notre bataille comme celles de nombreux autres dépendent de ce que nous pourrions réussir ensemble.
Nous en appelons donc à une rencontre de toutes celles et ceux qui le jugent nécessaire, pour ne plus rester isolé.e.s. Nous proposons de nous retrouver, nous les équipes militantes pour échanger sur nos histoires réciproques, pour créer des liens, pour nous coordonner afin d’envisager des initiatives unitaires. C’est ainsi que nous pourrions sortir du climat de résignation qui domine parmi nous salarié.e.s comme militant.e.s, pour retrouver le moral, la confiance en nous et du coup la force de résister à plus nombreux.
Nous lançons un appel large, comme on lance une bouteille à la mer, comme un SOS à une rencontre ce vendredi 28 juin, dans le créneau 10h-13h, à Paris. Le lieu reste à déterminer. Pour celles et ceux intéressé.e.s, vous pouvez nous contacter à notre adresse mail cgt-ford gmail.com ou sur notre site internet www.cgt-ford.com
Le syndicat Cgt-Ford, Blanquefort le 21 juin 2019.